La Cour des comptes tire la sonnette d’alarme : la Sécurité sociale française pourrait faire face à une crise financière profonde avec un risque de défaut de paiement dès 2027. Selon le rapport annuel sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale, la situation actuelle est jugée critique et inquiétante, menaçant la stabilité financière de cet organisme central.
Une situation financière désastreuse
En 2024, le déficit de la Sécurité sociale a atteint 15,3 milliards d’euros, marquant une augmentation significative par rapport aux 10,5 milliards de l’année précédente. Ce déficit ne semble pas être un événement isolé mais plutôt le début d’une spirale négative qui pourrait creuser l’écart jusqu’à 24,1 milliards d’ici 2028. Cette situation, qualifiée de « hors de contrôle » par les experts, soulève des questions sur l’efficacité de la gouvernance actuelle.
Les prévisions budgétaires qui ont soutenu la planification financière de la Sécurité sociale se sont avérées « peu réalistes ». En effet, les recettes ont été inférieures aux attentes de 7,7 milliards d’euros tandis que les dépenses ont dépassé les prévisions de 1,1 milliard. La capacité de l’Assurance maladie à maintenir ses objectifs de dépense est jugée « fragile », nécessitant des mesures d’économie urgentes.
L’avenir incertain de la Cades
Créée pour résorber les dettes de la Sécurité sociale, la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) se trouve elle-même en difficulté. Le rapport de la Cour indique que, dès 2025, le déficit dépassera la capacité annuelle de financement de la Cades, rendant sa mission de plus en plus complexe. Historiquement conçue pour disparaître en 2009, la Cades a vu sa fin prolongée jusqu’en 2033, mais sans renflouement, sa capacité à absorber de nouveaux déficits est compromise.
Avec la Cades à bout de souffle, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) serait contrainte de reprendre une partie de la dette. En 2025, cet organisme pourrait se retrouver avec plus de 41 milliards d’euros de dette, et potentiellement jusqu’à trois fois plus en 2028. Cette transition pose de nombreuses questions, notamment sur la capacité de l’Acoss à emprunter à court terme dans un marché déjà saturé.
Quels scénarios pour éviter la faillite ?
Face à la possibilité d’un krach social, la Cour des comptes examine plusieurs options. L’allongement de la durée de vie de la Cades au-delà de 2033 pourrait décharger temporairement la pression, mais nécessiterait une législation complexe difficile à faire passer. Une autre solution serait de doter la Cades de ressources supplémentaires, impliquant une augmentation des prélèvements obligatoires, une solution politiquement délicate.
Par ailleurs, des stratégies de retour à l’équilibre sont préconisées. Celles-ci incluent la révision des politiques d’allégement des charges et l’intégration des compléments de salaire issus de l’actionnariat salarié dans les calculs, des mesures qui pourraient générer jusqu’à 3 milliards d’euros.
L’appel à une réforme urgente
Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, exhorte à une action rapide, soulignant que « la dette fragilise le modèle social français ». Il insiste sur la nécessité de ne plus considérer ces enjeux comme secondaires, mais comme urgents et centraux pour préserver l’avenir financier de la Sécurité sociale.
Ainsi, une combinaison de réformes économiques et politiques sera indispensable pour garantir la pérennité de la Sécurité sociale. Les décideurs politiques doivent maintenant choisir entre des solutions à court terme ou s’attaquer à des réformes structurelles de fond, tout en maintenant un équilibre entre résolutions budgétaires et cohésion sociale.